« MARIAGE POUR TOUS » ET DROITS DE L’ENFANT
HOMOPARENTALITE. Il n’est pas étonnant que le « mariage pour tous » proposé par le gouvernement de nos voisins français suscite un vif débat. Occasion pour nous de réfléchir à ses enjeux. On peut parler en effet d’une véritable révolution parce que ce projet remet en cause un héritage millénaire concernant des fondements de société et de vie : mariage, filiation, adoption, égalité des sexes, identité des personnes, des enfants et de la famille. Nous nous limiterons ici à en souligner quelques points essentiels.
1. Le « mariage pour tous » est une expression qui revendique l’égalité des droits entre hétéros et homosexuels. Mais de quelle égalité s’agit-il ? Si c’est l’égalité de dignité, il nous paraît clair que celle-ci doit être reconnue à toute personne humaine indépendamment de son orientation sexuelle. La discrimination dont les homosexuels ont été et sont encore l’objet doit cesser au nom de cette égalité-là. Mais la question devient plus problématique quand on veut créer un lien entre l’union du couple et l’enfant, c’est-à-dire lier nécessairement la question du couple avec celle de l’adoption et de la filiation. Pourquoi ? Parce que, dans le cas du couple homosexuel, il y a deux femmes ou deux hommes (c’est un lien symétrique) alors que, dans le cas du couple hétérosexuel, la filiation y est naturellement déjà inscrite puisque nous venons tous d’une mère et d’un père et jamais de deux femmes ou deux hommes. La filiation implique donc nécessairement la différenciation sexuelle. Cette différenciation asymétrique du masculin et du féminin reste fondamentale dans la constitution de la filiation. Si « le mariage pour tous » fait si vif débat, c’est parce que l’expression comme le projet mélangent la question du mariage avec celle de la filiation. D’où la question : si le mariage gay ne peut pas construire la filiation, pourquoi lier les deux ?
2. Il faut aussi faire remarquer que l’égalité n’est pas l’identité. Comme personne humaine, nous sommes égaux en droits et en dignité, mais notre identité sexuelle est toujours différenciée : nous sommes femme ou homme mais pas les deux. Il n’est donc pas opportun de dire : « Parce que nous sommes égaux en droits et dignité, il y a identité entre le mariage homosexuel et le mariage hétérosexuel. » Ce n’est pas vrai et ça fait problème. Le mariage gay, qu’on le veuille ou non, gomme la différenciation sexuelle inhérente à l’identité masculine ou féminine. Le PACS en revanche a l’avantage de respecter la distinction entre l’union homosexuelle et le mariage. Pas d’ambiguité en ce cas.
3. Qu’en est-il des droits de l’enfant ? Que des couples homosexuels désirent un ou des enfants, on le comprend. Ils revendiquent alors le droit à l’enfant. Mais ce droit à l’enfant tient-il compte des droits de l’enfant ? Constatons que l’homoparentalité, qu’on le veuillle ou non, prive l’enfant de la mère ou du père. Elle crée donc une inégalité institutionnelle entre les enfants qui ont un père et une mère et ceux qui ont deux pères ou deux mères. Paradoxe conséquent : les couples homosexuels réclament l’égalité dans le mariage mais ils créent une inégalité dans la filiation. La véritable égalité serait de donner les mêmes droits à tous les enfants.
Des parents homosexuels objectent : « Nos enfants peuvent recevoir autant de soins, de protection, d’affection que les enfants de parents hétérosexuels. » C’est vrai. Mais il reste que l’enfant privé d’un père ou d’une mère a droit à la double représentation maternelle et paternelle dans la construction de son identité. Si des enfants naissent par exemple par insémination (PMA) d’une mère lesbienne, il y a inévitablement effacement du père. Pourquoi l’enfant garde-t-il pourtant le droit d’avoir un vrai père et pas un père de substitution, pourquoi gardera-t-il aussi le désir de connaître son géniteur (ce qui est de fait impossible par don de sperme anonyme) ? Parce que nul être humain ne peut naître de deux femmes ou de deux hommes. La nature est ainsi faite et nous en venons tous. Et la nature ici, ce n’est pas seulement l’héritage humain au sens biologique, mais aussi au sens psychique : si les fonctions maternelles et paternelles sont différenciées par nature, c’est qu’elles sont faites pour apporter à l’enfant une complémentarité irremplaçable tout au long de sa construction identitaire. Ce que deux mères ou deux pères ne peuvent tout simplement pas donner. De fait, « le mariage pour tous » est une négation de ce droit naturel.
François Gachoud