En réflexion...

LES ENFANTS DU PORNO

L’émission Temps présent diffusée au début du mois sur le sujet ne donne pas seulement à réfléchir. Ce problème revêt un caractère d’urgence. Si un enfant sur trois, entre 10 et 12 ans, a déjà visionné des images pornographiques, parents et éducateurs devraient passer de l’étonnement à la vigilance accrue et à l’action. Celle qui consiste à protéger l’enfant à tout prix. Il devrait tomber sous le sens que l’incidence de ces images sur de très jeunes cerveaux est conséquente. Pour plusieurs raisons.

L’enfant est d’abord cet être à la fois immature et innocent qui est incapable de comprendre et de mesurer le sens comme la portée de telles images. Son cerveau va les enregistrer comme une intrusion violente et dans violence il y a « viol ». Viol d’une intimité ignorante et fragile qui n’est en rien préparée à pareille agression. Il y va d’une forme de traumatisme de la conscience déboussolée. La mémoire va fixer ces scènes brutales et engendrer par là un trouble dont la cause comme l’effet sont incompréhensibles à l’enfant. Sans compter son incapacité de maîtrise et de distanciation par rapport à cette situation.

Seconde raison, évidente aux yeux de l’adulte, mais pas du tout à ceux de l’enfant : la représentation catastrophique qu’il va se faire de l’amour. Il ne sait pas encore ce que signifie aimer au sens du couple. Et le voilà devant les situations les plus crues des relations intimes entre homme et femme, si ce n’est pas celles de gens du même sexe. Conséquence : comment ne pas éprouver une confusion troublante ? C’est donc ça aimer ? Comment ne pas voir s’effondrer la représentation pourtant à peine esquissée du sentiment d’aimer à cet âge ?

A cela s’ajoute une confusion plus grave : celle d’assimiler ses propres parents aux scènes qu’il a vues : « C’est donc ainsi que font mes parents ! Ils baisent comme dans un film porno. » Comment rétablir dans l’âme de l’enfant une juste représentation de l’amour ?

Dans l’émission Temps présent, il y avait confirmation très nette de ces enjeux. On interrogeait trois ados de 15-16 ans qui ont violé  à tour de rôle une fille un peu plus jeune dans une cave. Sordide certes. Mais le plus significatif n’est pas là : c’est que, pour eux, le passage à l’acte était justifié par ce qu’ils avaient vu dans les films pornos. Le passage à l’acte allait de soi ! Etouffée, abolie, refoulée la valeur du sentiment amoureux, celle du respect pour une jeune fille consommée puis jetée comme un kleenex après usage.

Nous en sommes là aujourd’hui et nous le savons. Nous savons certes qu’une majorité de parents sont conscients de ce problème et sont vigilants. Mais l’est-on jamais assez face aux astuces des enfants et des ados, face aux sollicitations et tentations multiples qui les guettent ? Ce qui est impératif, c’est de redoubler de vigilance. Surtout de dialoguer sur le sujet et de leur parler d’amour. Car il y va en fait de ce qui touche à leur âme. Cette âme encore fragile, n’est-elle pas le lieu de leur vie la plus intime, lieu où se joue la mise en place des valeurs les plus profondes qui vont les marquer pour la vie ?

François Gachoud

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